Epilogue

J'ai rédigé ce petit document un mois après notre retour, afin d'avoir un recul sur mes impressions. Je ne pense pas avoir trahi le sentiment général, en donnant mes propres réflexions. Si tel est le cas, que la personne se sentant blessée me pardonne, car telle n'est pas ma pensée.

A ce jour, je reste encore stupéfait de la chaleur de l'accueil. Qui n'a pas été apostrophé par un Algérien nous lançant un "Je vous aime" surprenant. Nous avons senti une profonde volonté de ce peuple à renouer des contacts avec leurs anciens compagnons. Evidemment il n'est pas question de revenir sur le passé, mais avoir des échanges particuliers avec les Français, telle semble être la volonté des Algériens rencontrés. Pratiquement toutes les portes se sont ouvertes sur les anciens lieux de résidence, même si nous savons qu'il n'en a pas été de même pour tous, et notamment pour Lucette et Nicole.

Les Algériens de soixante ans et plus n'ont pas oublié les noms des pieds-noirs qui résidaient dans leur quartier. Cette mémoire a été aussi une surprise.

La langue française est très présente à Alger et dans ses environs. Toutes les boutiques ont des enseignes dans notre langue. Le parler français a été conservé parmi la population ayant été éduquée lorsque l'Algérie était un département français. Il est généralisé parmi le reste de la population ayant une éducation de niveau secondaire ou universitaire. Pour ceux qui n'ont pas atteint ces niveaux d'étude, le parler doit être fonction de leur environnement familial. Il reste des traces de la volonté à arabiser les études au détriment du français, des autorités algériennes de l'immédiat après indépendance. Toutefois, lors de notre visite à l'école de la Pointe-Pescade, nous avons assisté à l'enseignement du français par les jeunes élèves de l'école. Les enseignants nous ont confirmé que notre langue était à nouveau étudiée à ce niveau d'étude, afin de préparer les élèves aux cours supérieurs. Des voyages comme celui que nous avons accompli ne peuvent aussi qu'accentuer le parler français dans la population algérienne.

L'émotion du groupe a été aussi une constante. Chacun avait les yeux brillants lorsqu'il retrouvait un lieu qui lui était cher. Evidemment un brin de déception se lisait sur les visages lorsqu'ils observaient les changements apportés à leurs lieux d'enfance, mais la joie de revoir ces sites était plus forte. Je ne parlerai pas de l'émotion et de la joie des amis se retrouvant après plus de 40 ans de séparation, car cela a été décrit précédemment, mais je voudrai rappeler que ces moments furent très intenses.

Quant au pays par lui-même que dire ? La mer, les rochers et les plages sont toujours là, mais ce qui frappe, c'est cette densité de population. Le moindre espace est bon pour avoir un toit. Tout ceci n'est pas sans influence sur le paysage, et se traduit par des constructions disparates. Un énorme effort d'urbanisation reste à entreprendre, même si des immeubles s'élèvent autour d'Alger, immeubles essentiellement édifiés par des équipes chinoises. Sur ce dernier point, pour nous ceci semble surprenant, car lorsque nous voyons les chantiers de construction ou de travaux publics en France, nous remarquons que la majeure partie des ouvriers est d'origine nord-africaine. Il y a certainement quelque chose à faire, mais quoi ?

Un autre sujet a été évoqué, la sécurité dans ce pays. Un voyage de quatre jours est trop court pour avoir une idée certaine sur ce point, mais des lignes directrices apparaissent. La volonté générale de la population semble être d'oublier au plus vite les évènements de ces dix dernières années. Ce n'est qu'en discutant de vive voix avec les gens du pays, que nous pouvons comprendre les drames qu'ils ont vécus. Ce n'est pas la faute de nos médias qui nous informèrent régulièrement de ces évènements, peut être même mieux que les médias algériens, certainement moins libres sur ce sujet. Sans vouloir intervenir dans ce débat interne au pays, force est d'accepter l'idée que ses habitants ont vécu une période similaire à celle que nos parents ont vécu lors de la dernière grande guerre, pendant l'occupation par les forces nazies. La terreur était présente. Par le courage de gens sensés, que ceux-ci soient des autorités ou de simples citoyens, l'Algérie s'est sortie de cette période tragique. Tout n'est pas fini, mais pendant les quatre jours de notre séjour, dans la région d'Alger et dans la ville même, nous avons constaté que tous les moyens étaient utilisés pour sécuriser le pays.

Enfin une dernière phrase, qui résume par elle-même les impressions du séjour, beaucoup de voyageurs se sont jurés qu'ils retourneront dans les années à venir dans ce pays. Tout au moins telle est la volonté du groupe des huit élèves du cours complémentaire de la Pointe-Pescade pour l'année prochaine, mais pour un séjour de plus longue durée, avec des excursions plus profondes dans le pays. N'oublions pas que pour un grand nombre d'entre eux, leur adolescence étant contemporaine à la guerre d'Algérie, ils ne purent par insécurité visiter tout leur pays.

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Voyage en Algérie du 4 au 8 Mai 2005, ou Retour au Pays de Lucette - Epilogue

© Daniel Larcier - Janvier 2007